Fondation Jean Jaurès

1er août 2023

L’Union européenne vient de déployer un nouvel outil pour lutter contre la haine en ligne et la désinformation : le Digital Services Act (DSA). Entré en vigueur le 25 août dernier, le DSA doit permettre de protéger les internautes contre les propos haineux et les opérations de désinformation en ligne. Pour la Fondation Jean-Jaurès, l’historienne Stéphanie Courouble-Share analyse les enjeux techniques et politiques de cette initiative.

Les effets concrets de la radicalité en ligne

Le 9 octobre 2019, le jour de Yom Kippour, un jeune Allemand de vingt-sept ans, Stephan Balliet, a tenté de perpétrer un attentat dans une synagogue de la ville de Halle (Saale), dans l’est de l’Allemagne. « Bonjour, je m’appelle Anon, et je pense que l’holocauste n’a jamais eu lieu », a déclaré en anglais Stephan Balliet devant une caméra alors qu’il diffusait son acte en ligne, et avant de tuer deux personnes. Puis il a poursuivi : « Le féminisme est la cause de la baisse des taux de natalité en Occident, et cela sert de justification à l’immigration de masse, la racine de tous les problèmes sont les Juifs ».

Bien qu’Allemand, Stephan Balliet a prononcé ses propos en anglais, pour que sa vision du monde de suprémaciste blanc soit largement transmise à sa communauté en ligne. Le terroriste est issu d’une sous-culture d’extrême droite, connectée, qui se radicalise politiquement à travers des forums, des plateformes pour les joueurs et des applications comme Telegram. En outre, et pour la première fois, cette attaque terroriste a été marquée par l’utilisation de propos négationnistes, ce qui illustre clairement la dangerosité de cette idéologie.

Toutes les études formelles soulignent l’urgence de cette situation, mettant en évidence le fait que les terroristes se radicalisent en ligne, amplifiant ainsi la menace. Face à cette problématique, le Digital Service Act vise à répondre à cette urgence en proposant des mesures adaptées pour contrer efficacement la radicalisation en ligne.

Le Digital Service Act

Le Digital Service Act, souvent abrégé en DSA, représente une avancée majeure dans la régulation des services numériques en Europe. Il est issu de la volonté de moderniser la directive sur l’e-commerce de juin 2000 pour répondre aux nouveaux enjeux du numérique et aux défis posés par les grandes plateformes en ligne. En étendant la réglementation à un plus grand nombre de services numériques, l’objectif de l’Union européenne (UE) est de créer un environnement en ligne plus sûr, plus transparent et plus équitable pour les utilisateurs et les entreprises. Les « géants d’internet devront s’adapter aux règles de l’EU », selon les mots de Thierry Breton, le commissaire européen au marché intérieur, et  « tout ce qui est interdit “off line”, c’est-à-dire dans la vie de tous les jours, doit l’être aussi “on line”, c’est-à-dire en ligne », continue-t-il.

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